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Photo du rédacteurCarla Flotte

La réinsertion professionnelle des schizophrènes


Sommaire


Introduction

I . Facteurs empêchant l’insertion professionnelle

1. Manifestations de la schizophrénie

A) Symptomatologie

B) Troubles cognitifs

2. Facteurs exogènes

A) La population "naïve"

B) Le personnel soignant

3. Facteurs endogènes

II. Textes en vigueur

1. Les lois

2. La réglementation

III. Les organismes

1. Organismes d’accueils

A) Lieux d’habitations

B) Structures d’insertion professionnelle

C) Centres d’évaluation cognitive

2. Organismes d'aides

A) Les commissions

B) Les associations

C) Autres

Conclusion

Bibliographie



Disclaimer : cet écrit a été produit lors de mes études, certaines tournures de phrases, idées ou formulation sont peut être maladroites et mériteraient réécriture, cependant je tiens à garder l’authenticité de mes écrits. Merci de votre compréhension.



Introduction

La schizophrénie est un trouble psychique sévère et chronique. Elle se manifeste la plupart du temps entre 15 et 30 ans. Elle s’aggrave de façon croissante et d’autant plus lors des cinq premières années (Lalonde, 2007). Son évolution peut prendre plusieurs formes. Elle se définit généralement par une fragmentation de l’esprit et une indifférenciation au monde extérieur. Selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), on compte près de 600 000 schizophrènes aujourd’hui en France. Cette pathologie n’est pas des moindres, en effet un patient sur deux tentera de se suicider et 10% en décéderont.


Malgré sa gravité, la maladie psychique n’a pas toujours été considérée et ni diagnostiquée. Avant la révolution française, le malade psychique appelé "fou", n’est pas prit en charge de façon spécifique. Il n’existe pas de professionnels ni d’hôpitaux spécialisés. Il est ainsi placé dans un hôpital standard et subit une isolation. A la fin du 18ème siècle Pinel invente le traitement moral dont le "fou" pourra bénéficier puisqu’il est désormais considéré comme malade. Ils sont ainsi placés dans des hôpitaux spécialisés. En 1801 Pinel utilise le terme d’aliénation mentale pour désigner ce qui était avant la "folie". Au cours du 19ème siècle la psychiatrie devient une spécialité médicale, la psychanalyse se développe également permettant au malade d’être suivi de façon adaptée. La loi 1838, inspiré par Esquirol, permet une prise en charge dans de meilleures conditions et une distinction entre internement volontaire et internement d’office. Chaque département se voit également dans l’obligation d’ouvrir un établissement public. Au 20ème siècle se développe la volonté de soigner. De 1930 à 1950 un traitement par chocs électriques est instauré et laisse ensuite place aux chimiothérapies. Enfin, en 1960, se développe l’utilisation de médicaments psychotropes (neuroleptiques, antidépresseurs, anxiolytiques, etc..) qui constituent encore de nos jours les principaux traitements des handicapés psychiques. Dans cette même période Bonnaffé remet en question l’enfermement ce qui amène à diminuer l’importance de l’hospitalisation (Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2019). En 1948 l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est créée dans le but d’harmoniser l’accès à la santé de ses 194 états membres. Pour cela elle publie plusieurs classifications. Elle commence dès 1948 en reprenant la Classification des causes de décès élaboré en 1893 par Jacques Bertillon, médecin français, pour en faire la Classification statistique internationale des maladies, traumatismes et causes de décès appelé plus couramment la Classification internationale des maladies (CIM). En 1967, pour honorer son but premier d’homogénéité, l’OMS stipule que tous ses états membres doivent se référer à cette classification pour recueillir leurs données statistiques sur la morbidité. Cette classification a subi de nombreuses modifications dont la dernière version date de mai 2019. En 1980 l’OMS publie la Classification internationale des handicaps et santé mentale (CIH). Elle vient compléter la (CIM), étant plus orientée sur le malade lui-même. En effet elle évalue les déficiences physiologiques, anatomiques ou psychologiques, ainsi que les incapacités et les désavantages qu’elles engendrent. Elle subit une révision en 2001 qui lui vaut le nom de Classification internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF). Elle prend désormais en compte les aspects environnementaux et personnels du handicap. Entre temps, suite à l’accroissement du nombre d’accidents de travail causés par la révolution industrielle et la seconde guerre mondiale, le terme handicap apparait pour la première fois dans la législation du travail en 1957. Suite à cela plusieurs lois sont venues renforcer les droits des travailleurs handicapés. Ces lois étant pour une grande partie encore en vigueur, elles seront étudiées plus en détail dans un partie postérieure du mémoire (Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2019).

Pour ce qui est de la schizophrénie, l’historique de son développement est également long et complexe. Le premier cas de schizophrénie répertorié apparait en 1860 dans le Traité des maladies mentales de Morel. Ce dernier emploie le terme de démence précoce cependant il ne désigne pas une pathologie à proprement parler mais fait office de description sémiologique. En 1863 Kahlbaum, dans sa classification des maladies mentales, publie le terme de vesania typica (folie typique) pour décrire une maladie mentale qui apparait au moment de la puberté et tend vers une démence. Son collègue Hecker, introduit le terme d’hébéphrénie en 1871 en tant que pathologie à part entière avec des symptômes différents mais apparaissant à l’adolescence. Kahlbaum introduit par la suite la catatonie en 1874. Kraepelin publie ensuite son Traité de psychiatrie. Dans les trois premières éditions (1883, 1887 et 1889) il utilise le terme wahnsinn pour décrire une pathologie qui se rapproche de la schizophrénie actuelle. Dans la quatrième édition (1893) il inclut la catatonie de Kahlbaum, la dementia praecox qui s’apparente à l’hébéphrénie de Hecker et la dementia pranoïdes. Dans la cinquième édition (1896) il les relie par leur évolution commune qui tend vers la démence mais les distingue encore. Cette évolution l’amène, dans la sixième édition (1899), à regrouper les trois concepts en une même pathologie : la démence précoce. Elle peut prendre trois formes : hébéphrénique, catatonique et paranoïde. Il accorde une place centrale à cette évolution,

pour lui elle serait plus importante que les symptômes eux mêmes pour définir la pathologie. Dans la septième édition (1903-1904) il rectifie ses propos et stipule que l’évolution n’est finalement peut être pas si importante car elle n’est pas équivalente pour tous les malades. Il introduit également une hypothèse biologique en prétendant que la démence précoce serait liée à des lésions dans le cortex cérébral. Plus tard, entre 1913 et 1919, il admettra que la démence précoce ne se manifeste pas toujours de façon précoce et que l’évolution ne tend effectivement pas toujours vers la démence. Suite à cela il essaye donc de définir la pathologie par des caractéristiques psychologiques internes. Pour revenir un peu en arrière, Bleuler avance le terme de schizophrénie en 1908 au cours d’une conférence au congrès de l’association allemande de psychiatrie. Il tire ce terme du grec schizein qui signifie fractionnement et de phrèn qui signifie esprit, caractéristique première de cette pathologie selon lui. Après avoir observé un grand nombre de patients il déclare que la pathologie est en fait un groupe pouvant prendre plusieurs formes, qu’elle ne tend pas systématiquement vers la démence, n’est pas systématiquement précoce et qu’elle peut être guérie. En 1911 dans Dementia praecox ou Groupe des schizophrénies, à l’inverse de Kraepelin, il définie la pathologie par ses symptômes. Il distingue les symptômes fondamentaux comme la perte d’associations (trouble du cours de la pensée), la perte d’affectivité, l’ambivalence et l’autisme (perte de contact avec la réalité). C’est d’ailleurs lui qui invente ce dernier terme. Il distingue également des symptômes accessoires comme les hallucinations, les idées délirantes, les troubles du langage, etc... Dans sa classification il distingue quatre formes de schizophrénie : paranoïde (caractérisée par une étrangeté, une impression de destinée), catatonique (caractérisée par une agitation dans la sphère psychique et motrice) hébéphrénique (caractérisée par un abêtissement) et simplex (présente seulement les symptômes fondamentaux). Dans un article de 1912 Elmer Ernest Southard démontre que la schizophrénie est corrélée à une hypoplasie des régions préfrontales. Après les années 1970 plusieurs études ont démontré la présence d’un facteur génétique à hauteur de 80% (Crocq, 2012). Différents courants psychanalytiques se sont également penchés sur la schizophrénie. Pour Freud elle représente principalement un détachement de la libido du monde extérieur engendrant une régression vers le Moi. Il stipule également que le schizophrène ne possède pas la faculté du transfert ce qui empêcherait sa psychanalyse. Après 1920 Klein démentira ces deux affirmations. Selon elle le repérage diagnostic psychanalytique est possible à travers l’analyse du passage de la position schizo-paranoïde et la présence de mécanismes de défense (relation d’objet partielle, déni, clivage instable, identification projective, etc...). Bion lui confère une place au langage très importante. Il serait un outil pour communiquer, pour penser et pour accomplir les mécanismes de défense tel que l’identification projective et le clivage de l’objet. Beaucoup de progrès ont été réalisés et la schizophrénie est aujourd’hui reconnue comme une pathologie qu’il faut soigner. Cependant, dans un contexte économico-social actuel stressant, un nouveau problème se pose : celui de l’insertion professionnelle. La désinsertion professionnelle des schizophrènes est aujourd’hui très importante en France, 80 à 90% en sont concernés (Marwaha et al., 2007). Selon la fondation FondaMental la maladie mentale serait la première cause d’invalidité et le second motif d’arrêt de travail (Fondation FondaMental, 2009).


Du point de vue économique, cette désinsertion représente une dépense de 107,7 milliards d’euro en 2005 soit un tiers des dépenses de l’état. Elle est due aux dépenses sanitaires, aux paiements des prestations sociales et médico-sociale et à la perte de production qu’elle engendre (Fondation FondaMental, 2009).

L’insertion professionnelle représente également un enjeu personnel pour les schizophrènes. En effet plusieurs études montrent que l’obtention d’un emploi aurait un impact positif sur leur santé. L’UNAFAM par exemple déclare que "la possibilité de travailler réduirait de 35% le risque d’une hospitalision" (Assemblée nationale, 2013). Le travail permettrait l’encrage dans la réalité, l’augmentation de la confiance en soi apporté par le sentiment d’efficacité et la mise en relation avec d’autres individus, ce qui est bénéfique pour le schizophrène qui est très renfermé (Pachoud & Corbière, 2014).


Il est ainsi possible de constater à quel point la question de l’insertion professionnelle des schizophrènes est importante encore de nos jours. Cela amène ainsi à se demander quelle est la réalité de l’insertion professionnelle des schizophrènes aujourd’hui en France ?


On peut faire l’hypothèse que la réinsertion professionnelle des personnes atteintes de schizophrénie est compliquée. Il est remarquable qu’une forte stigmatisation des personnes malades émane de la société. En général la maladie fait peur et éloigne les individus. Le handicap, est également très stigmatisé par la peur qu’il engendre. Cette observation est d’autant plus visible si l’handicap est mental ou psychique. Ces deux termes sont d’ailleurs difficilement distingués par la plupart de la population. La schizophrénie est une maladie ''effrayante'' pour une grande part de la population car elle est très mal connue et est associé à la folie et la violence. On peut également noter que la population française est une population très stigmatisante, qui se base beaucoup sur les stéréotypes pour se protéger de la différence qui "effraie". Cependant on peut tout de même supposer que l'insertion des schizophrènes augmentent légèrement depuis la moitié du vingtième siècle car cette

pathologie est désormais reconnue comme un handicap.



I. Facteurs empêchant l’insertion professionnelle

A) Manifestations de la schizophrénie

1. Symptomatologie


Il faut rappeler que la symptomatologie est variable d’un patient à l’autre. De manière général trois formes de symptômes sont observables chez les schizophrènes : positifs, négatifs et dissociatifs. Les symptômes positifs, dit "en plus" par rapport à une "norme" non pathologique, correspondent entre autres aux hallucinations ou aux délires. Les symptômes négatifs correspondent eux à un "manque" par rapport à cette norme. On y retrouve par exemple le retrait social et l’appauvrissement affectif ou émotionnel. Les symptômes dissociatifs quand à eux correspondent à une désorganisation de la parole, de la pensée ou du comportement (Inserm, 2020). Il est possible de constater que ces symptômes ont un impact négatif sur l’insertion professionnelle principalement par le biais de la désinsertion sociale qui est une composante essentielle du monde du travail (McGurk & Mueser, 2006). Pour les symptômes positifs la présence de délire trop important pourrait être dérangeante non seulement pour les personnes qui l’entourent dans le travail mais également pour lui même car il ne serait pas à l’aise et aurait du mal à effectuer pleinement certaines tâches. Les symptômes négatifs eux engendrent une désinsertion sociale qui n’est pas favorable au monde du travail car il faut souvent partager, échanger et travailler en communauté. Enfin les symptômes dissociatifs engendrent un contact avec la réalité du monde extérieur difficile. En effet le sujet schizophrène entretient une relation fusionnelle avec le monde qui l’entoure, il ne peut donc pas se distinguer de l’autre. Le contact avec l’autre est également entaché car le moyen de communication de base est affecté chez le schizophrène. En effet son rapport au langage est très compliqué et ne lui permet pas d’échanger de façon socialement "normale" : il ne possède pas la faculté pour comprendre le second degré et les métaphores. Il est également difficile de suivre le cours de sa pensée lors de son élocution car le schizophrène produit beaucoup de coq-à-l’âne. Ces différents symptômes semblent ainsi être les premières raisons de la désinsertion professionnelle des schizophrènes. Cependant de nos jours les symptômes positifs peuvent être très bien controlés et diminués par le moyen de traitements neuroleptiques. Les symptômes négatifs et dissociatifs eux peuvent être diminués par un travail plus en profondeur à l’aide d’un suivi psychologique. La présence de symptôme n’est pas le seul aspect de la schizophrénie qui pourrait gêner le travail et la vie en communauté.



2. Troubles cognitifs


En effet les schizophrènes présentent beaucoup de troubles cognitifs susceptibles de freiner leur insertion professionnelle. Les principales déficiences cognitives observées chez les schizophrènes concernent les fonctions exécutives (mise à jour en mémoire de travail, inhibition et flexibilité mentale), la mémoire à long terme déclarative (épisodique et sémantique) et l’attention (sélective et maintenue) (Harrois, 2002). Le déficit de la mémoire de travail chez le schizophrène le rend incapable de maintenir une représentation dans son esprit. Cette représentation inexistante ne peut donc pas être restituer dans le but de l’accomplissement d’une tâche précise (Baddeley et al., 1955; Danion, et al., 1992). De façon clinique cela peut être relié au manque de second degré et de métaphore présent dans la pathologie. Le manque d’inhibition ne lui permet pas d’agir de façon socialement correcte puisque toute action qui lui passe dans la tête est exécutée. Le manque de flexibilité mentale ne lui permet pas non plus de s’adapter au monde qui l’entoure et d’autant plus aux situations nouvelles, ce qui pourrait venir nourrir son angoisse. Le trouble de la mémoire déclarative lui, est en grande partie dû à un manque de cohérence dans le rappel conscient. En effet pour effectuer un rappel libre il faut être capable d’organiser l’information pour la remémorer grâce au contexte d’apprentissage, l’attention est donc également sollicitée. Cette déficience rappelle le manque de cohérence qui existe dans le psyché et le langage du schizophrène. De plus les symptômes négatifs aggraveraient ces déficits en ralentissant sa vitesse de traitement impactant ainsi la mémoire déclarative et la mémoire de travail. Pour ce qui est du trouble de l’attention sélective, il rend le schizophrène incapable de se concentrer sur une seule information lorsqu’elle se trouve parmi d’autres (Harrois, 2002). Ce trouble pourrait provenir du mauvais traitement des informations contextuelles que réalise le schizophrène : les stimuli lui apparaîtraient tous comme nouveau (Danion et al., 1992). Il se sent donc obligé de tous les traiter ce qui pourrait également le submerger et augmenter son angoisse. Un trouble de l’attention soutenue empêchera le schizophrène de se concentrer longtemps sur la même information, ce qui est très handicapant dans le monde du travail. De plus, selon Frith, un trouble de la représentation consciente de ses buts est également observable. Il serait causé par une déficience du contrôle de ses actes due à l’impulsivité par exemple et une déficience du contrôle des intentions d’autrui due à une mauvaise interprétation parfois paranoïde (Frith, 1996). Il faut tout de même noter que chaque patient ne présente pas les mêmes symptômes cognitifs et un profil type n’est pas élaborable (Harrois, 2002).

Il est donc observable dans un premier temps que les déficits dans la sphère cognitive ont un fort

impact sur l’interaction sociale, alors qu’elle est un point essentiel dans le travail. De nombreuses études ont démontré que la présence de troubles cognitifs était corrélée négativement à l’obtention d’un travail. Elles montreraient également qu’ils auraient un effet encore plus négatif que les autres symptômes. Franck, par exemple, relie la reprise d’un emploi avec l’attention, la mémoire de travail et la vitesse de traitement. Une déficience dans l’attention et la mémoire de travail impacterait négativement l’accomplissement des tâches dans le travail. Une déficience des fonctions exécutives ainsi que de vitesse de traitement impacterait indirectement le travail par le biais des relations sociales comme évoqués précédemment (Franck, 2014). McGurk et Mueser relient également négativement l’attention, la rapidité psychomotrice, l’apprentissage verbal et les fonctions exécutives à la possibilité de travailler en milieu ordinaire ou protégé (McGurk & Mueser, 2006). De nos jours beaucoup de thérapies existent pour limiter ces déficits cognitifs, elles seront précisées en détail dans une partie postérieure. Malgré ces progrès il est observable que la désinsertion professionnelle persiste. Elle serait alors plutôt due à des facteurs exogènes émanant de la société.



B) Facteurs exogènes

1. La population "naïve"


Il est possible d’observer que la maladie, et particulièrement la maladie mentale est très stéréotypée par la population dite naïve. Ici la population naïve représente tout individu français n’appartenant pas au domaine médical et les chiffres qui suivront s’y rapportent. Les stéréotypes qui touchent la schizophrénie sont principalement dus à une méconnaissance de la maladie. Le premier stéréotype est celui du danger et de la violence. Il est partagé par 83% des français selon le baromètre de la schizophrénie réalisé par l’UNAFAM, l’association Promesses et la Fondation Pierre Deniker en 2018 (Blard, 2018). Ce stéréotype va de paire avec la pensée selon laquelle la schizophrénie serait liée à la criminalité. Il est en effet possible de relier troubles mentaux et violence, cependant seulement 15 à 20% des meurtriers en seraient atteints (Richard-Devantoy et al., 2009) et seulement 1% seraient schizophrènes (Blard, 2018). La méconnaissance engendre également des confusions symptomatologiques : 81% des français pensent que le dédoublement de la personnalité est un symptôme de la schizophrénie. En réalité la fragmentation présente dans la schizophrénie se réfère au morcellement du moi, notion psychanalytique freudienne faisant référence à une instance psychique régie par le principe de réalité, et non à une division de la personnalité. Elle est également confondue avec la bipolarité par 70% des français et par les TOCs (troubles obsessionnels compulsifs) par 51% des français (« Le grand baromètre de la schizophrénie, données complémentaires ... », 2019). La méconnaissance de la prise en charge de la maladie est également importante : 54% des français pensent qu’une médicamentation à vie est nécessaire et qu’une vie normale ne leur est pas accessible (« Le grand baromètre de la schizophrénie, données complémentaires ... », 2019). Ce préjugé va de paire avec le préjugé selon lequel les schizophrènes ne pourraient pas travailler et devraient rester enfermés en hôpital psychiatrique. Toute cette méconnaissance engendre par la suite une stigmatisation et des comportements discriminatoires. En effet 56% des français refuseraient de travailler avec une personne schizophrène (Fondation FondaMental, 2009). Il est possible de déduire que l’embauche d’une personne schizophrène n’est alors pas plus attirante pour l’employeur.

Il faut noter que la stigmatisation ne provient pas seulement de la population "extérieure", elle est également présente chez la famille du malade ainsi que chez le personnel soignant, ce qui est d’autant plus grave.



2. Le personnel soignant


Il est important de souligner que les préjugés évoqués précédemment sont présents également chez les professionnels de santé. En effet pour 32% des psychiatres, 68% des infirmiers, 77% des médecins généralistes et 90% des pharmaciens la schizophrénie est considérée comme dangereuse. Le dédoublement de la personnalité serait également considéré comme un symptôme de la schizophrénie par 54% des psychiatres, 75% des infirmiers, 88% des pharmaciens et 94% des médecins généralistes (« Le grand baromètre de la schizophrénie, données complémentaires ... », 2019). Au sein des institutions un autre frein à l’insertion professionnelle des malades se développe : le manque de liens entre l’équipe médico-sociale et le service psychiatrique (psychologue, psychiatre). En effet il est possible de constater que l’avis du psychologue ou du psychiatre dans l’insertion professionnelle ou dans d’autres projets n’est pas toujours pris en compte, 20 à 25% des soignants ne considèrent pas que l’accompagnement psychologique soit nécessaire pour cette pathologie (« Le grand baromètre de la schizophrénie, données complémentaires ... », 2019). Celui des éducateurs par exemple prime alors qu’ils n’ont pas accès à la composante psychologique nécessaire pour établir toutes les données. Cela serait également dû à une méconnaissance du trouble, le personnel médico-social, hors psychologue, recevrait une formation trop succincte sur les maladies psychiques auxquelles ils sont pourtant souvent

confrontés. Cette méconnaissance et non-écoute du personnel psychiatrique peut ainsi mener à une mauvaise orientation dans la vie professionnelle pour le schizophrène car elle sera inadaptée à ses capacités psychiques. Cette discrimination par la population naïve et médicale va non seulement isoler socialement et professionnellement le schizophrène mais va également influencer son mental et aggraver sa désinsertion professionnelle.



C) Facteurs endogènes


Avant tout une stigmatisation peut émaner du sujet lui-même. Si une bonne conscience de soi peut aider le sujet schizophrène à progresser dans sa pathologie, une conscience de ses troubles peut freiner son estime de soi. En effet, il peut se dévaloriser et se sentir incapable de réussir une tâche ou de se retrouver entouré de plusieurs personnes dans le monde du travail (Mendes et al., 2012) alors que ce sont deux facteurs importants pour la réussite de son insertion professionnelle (Choi, et al., 2013). En effet, un but trop élevé semble alors inatteignable et engendre une perte de motivation voire une perte de confiance en soi. Ainsi pour réaliser une insertion professionnelle il faut proposer des buts adaptés et réalisables. Le manque de motivation à progresser et de confiance en soi pourrait également entacher l’alliance thérapeutique qui est pourtant nécessaire à la réussite d’un travail psychothérapique, indispensable dans l’accompagnement à l’insertion professionnelle (Bioy & Bachelart, 2010).

La stigmatisation externe elle, peut conduire à la menace du stéréotype, concept développé par Claude Steele et Joshua Aronson en 1995. La menace du stéréotype est un effet qui se manifeste lorsqu’une personne appartenant à un groupe stéréotypé se trouve dans une situation où le stéréotype peut se manifester. La personne va ainsi ressentir de l’anxiété car elle se sent jugée et a peur de confirmer le stéréotype, ce qui va au final venir le confirmer. Ce phénomène va ainsi renforcer le manque de confiance en soi et la motivation.

Ces différents facteurs montrent que deux aspects sont à travailler pour améliorer l’insertion professionnelle des schizophrènes : la lutte contre la discrimination et l’accompagnement des patients par les professionnels de santé. Pour réguler cela plusieurs textes sont appliqués en France.



II. Textes en vigueur

A) Les lois


De nombreuses lois existent en France pour favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées et par conséquent des schizophrènes. Comme évoqué en introduction le terme de handicap est apparu pour la première fois dans la loi du 23 novembre 1957 sur le reclassement des travailleurs handicapés (Sarr, 2008). Par la suite la loi du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées leur donne un meilleur accès aux institutions, à l’éducation et au travail favorisant ainsi l’égalité des chances. Ensuite une loi très importante dans l’insertion professionnelle vient renforcer ce progrès : la loi du 10 juillet 1987 en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés. En effet elle instaure l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH) pour les entreprises publiques, qui sera détaillée dans la partie suivante. Ensuite, pour palier aux discriminations qui empêchent l’insertion professionnelle, la loi relative à la protection des personnes contre les discriminations en raison de leur état de santé ou de leur handicap est instaurée le 12 juillet 1990, les rendant ainsi délictueuses. Seulement une partie de ces lois est encore en vigueur car nombre de leurs articles ont été abrogés et remplacés par de nouvelles lois comme la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées appelée plus couramment la loi handicap. C’est une des lois les plus importantes à ce jour. Elle émerge à la suite d’un intérêt scientifique et d’une prise de conscience de l’exclusion des personnes handicapés de plus en plus croissante. Elle réaffirme et élargie les principes présents dans les lois précédentes afin de les rendre plus réalisables, de les alléger administrativement et de les adapter à d’autres domaines (Giordana, 2010). Elle ajoute également l’obligation d’un accès aux personnes handicapées dans les lieux publics et les entreprises. C’est une loi très importante car elle reconnait légalement le handicap psychique pour la première fois. Elle le différencie du handicap mental, ce dernier étant dû à une altération des capacités mentales et non une maladie psychique. Cela permettra une meilleure compréhension du handicap entrainant une meilleure insertion des handicapés psychiques. Elle représente l’inclusion dans la société d’une population ignorée jusqu’à présent. Le 8 août 2016 la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels introduit les emplois accompagnés qui seront détaillés dans la partie suivante. Le 23 novembre 2018 la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique ou loi ELAN, redéfini les habitats inclusifs. Le 5 septembre 2018 la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ou loi Avenir favorise l’emploi des personnes handicapées en réformant l’OETH. Cette nouveauté sera également détaillée dans la partie suivante. Ainsi ces lois engendrent plusieurs réglementions et surveillent leurs applications.



B) La réglementation


Une des réglementations les plus importantes est la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH). Ce statut élaboré par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH), apporte une aide à l’accès et au maintien à l’emploi. Pour l’obtenir l’individu fait l’objet d’une évaluation. La RQTH est accessible pour les individus de plus de 16 ans souffrant d’un handicap psychique, physique, sensoriel, mental ou encore d’une maladie qui empêche l’accomplissement complet du travail. Auparavant elle était délivrée pour une certaine durée renouvelable, mais depuis 2019 le comité interministériel du handicap (CIH) l’a rendu permanente pour les personnes dont le handicap n’est pas améliorable. Cette idée a été renforcée également lors du vote pour l’année 2020 (Maisonneuve, 2019). Normalement c’est le médecin du travail assigné à l’entreprise qui introduit la question de la maladie mentale avec le salarié. En réalité beaucoup d’entreprises n’ont pas les ressources nécessaires pour compléter et donner suite à ces évaluations.

Une deuxième réglementation très importante est l’Obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH). Comme évoqué précédemment, la loi du 10 juillet 1987 instaure l’OETH obligeant tous les employeurs gérant une entreprise privée comptant plus de 20 salariés, à employer 6% de travailleurs handicapés. Depuis 2005 avec la loi handicap, l’OETH est applicable au secteur public également. Le recrutement se fait alors par l’Etat, la fonction territoriale et la fonction hospitalière. En 2018 avec la loi Avenir, l’OETH a été réformée dans le but de faciliter l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Pour cela elle allége les démarches administratives et accorde les politiques du secteur privé et du secteur public. Chaque année les entreprises concernées doivent faire une déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés (DOETH). Un délai de trois ans est donné aux nouvelles entreprises. Au sein de l’entreprise c’est la mission handicap, branche des ressources humaines, qui en surveille l’application. Si cette réglementation n’est pas respectée, les entreprises privées doivent payer une contribution annuelle, proportionnelle au nombre de salarié, à l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des

personnes handicapées (AGEFIPH). Pour le secteur public les trois organismes doivent verser une 12

contribution aux fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Pour encourager le respect de la réglementation l’AGEFIPH offre des formations et des aménagements aux entreprises privées qui la respecte. La FIPHFP elle, finance pour les entreprises publiques des aides et des conventions en relation avec des partenaires médicaux spécialisés dans le handicap (Louargant, 2019). Par exemple depuis le 17 mars 2020, dans le contexte de la crise sanitaire du covid-19, la FIPHFP a mis en place une aide pour le télétravail des travailleurs handicapés en finançant, à hauteur maximum de 1000€, un équipement informatique et une connexion internet (« COVID-19 - Le FIPHFP met en place deux aides pour accompagner les travailleurs handicapés pendant le confinement », 2020).

Les emplois accompagnés sont également une aide importante pour les sujets schizophrènes. Ce dispositif intervient lorsqu’un travailleur handicapé cherche à entrer dans le monde du travail ordinaire ou éprouve des difficultés dans son travail et que l’employeur en fait la demande. Ils apportent ainsi une aide à l’insertion et au maintien dans l’emploi en évaluant les capacités du salarié, en l’orientant dans un projet professionnelle adapté, en faisait le lien avec l’employeur et en aménageant sont espace de travail. Une aide médico-sociale est également apportée. Ce qui est nouveau avec ce dispositif c’est qu’il s’adresse également à l’employeur et qu’il n’est pas utile seulement lors de l’insertion mais également lorsque l’emploi est acquis. Le suivi se fait à l’aide d’un conseiller en emploi spécialisé, il ne doit pas provenir du domaine médical mais du monde du travail, ce qui implique donc une bonne alliance avec l’équipe médicale (Pachoud & Allemand, 2013). A l’échelle nationale un budget leur est consacré et augmente chaque année (« Emploi et handicap  : l’emploi accompagné », 2017). Pour 2020 il a était voté à hauteur de 9,92 millions d’euros contre 6,9 millions d’euros pour 2019. En fin 2018, 54 structures encadrent les emplois accompagnés apportant ainsi une aide à 1228 personnes handicapées et 441 employeurs (« Projet de loi de finances pour 2020  : Solidarité, insertion et égalité des chances », s. d.). A l’échelle Européenne ce dispositif est soutenu par l’association European Union of Supported Employment (EUSE). Ces différentes lois et réglementations apparaissent comme essentielles pour contrôler l’insertion professionnelles des schizophrènes. Elles sont accompagnées d’organismes qui ont pour but de développer l’insertion professionnelle sur le terrain.



III. Les organismes

A) Organismes d’accueils

1. Lieux d’habitations


En France il existe différentes structures qui facilitent l’insertion professionnelle des handicapés psychiques. Elles les confrontent à la vie sociale et au travail de manière adaptée et progressive en attendant une insertion dans le monde du travail ordinaire. Dans un premier temps ils existent des structures d’accueils sous formes de logements collectifs. Elles permettent un accueil permanent ou temporaire. Plusieurs professionnels y sont présents comme des psychologues, des psychiatres et des éducateurs permettant un suivi médical et social. Elles n’apportent pas directement une insertion professionnelle mais permettent une première insertion sociale. Dans certains établissements les éducateurs peuvent tout de même accompagner les résidents dans une démarche de recherche d’emploi s’ils en ont les capacités. Parmi ces structures on retrouve les habitats inclusifs ; les maisons d’accueil spécialisées (MAS) ; les foyers d’accueil médicalisés (FAM) où on retrouve des pathologies à manifestations lourdes qui nécessitent un suivi médical plus important comme la présence d’infirmières ; les foyers d’hébergement pour travailleurs handicapés (FHTH) qui eux sont réservés aux travailleurs handicapés ayant déjà un travail en entreprise ordinaire ou adaptée. Toutes ces structures permettent de limiter la stigmatisation et la discrimination que perçoivent les handicapés psychiques puisqu’on y retrouve seulement des professionnels de santé normalement avertis et les handicapés psychiques eux-mêmes.



2. Structures d’insertion professionnelle


Il existe également des structures plus axées sur l’insertion professionnelle elle-même.Les clubhouses sont des structures d’accueil de jour non médicalisées réservées aux personnes souffrant d’un handicap psychique majeur. Elles ont pour but d’apporter une insertion sociale et professionnelle. Pour cela on y retrouve plusieurs activités : tâches ménagères collectives, recherche d’emploi, ateliers de communication, coaching, activités culturelles, etc... C’est l’organisation Clubhouse France qui en est à l’origine en France mais les clubhouses existent déjà depuis 1948 aux Etats-Unis. Le premier ouvert en France date de 2011, actuellement on en compte trois en France, à Bordeaux, Lyon et Paris mais l’association a pour but d’en ouvrir d’autres (« Nos clubhouses », s. d.).Les établissements et services d’aide par le travail (ESAT) sont des établissements médico-sociaux réservés aux personnes atteintes de handicaps n’ayant pas les capacités pour rejoindre une entreprise ordinaire ou une entreprise adaptée. Ils proposent un travail adapté au sein de l’établissement, favorise le lien social ainsi que l’autonomie. Un suivi psychologique et éducatif est également mis en place par des psychologues et des éducateurs. Des stages et des formations sont aussi proposés afin de maintenir et renforcer les acquis et en apporter de nouveaux. Lorsque les individus ont atteint une capacité de travail suffisante, ils peuvent sortir de l’ESAT et rejoindre le monde du travail ordinaire (Assemblée nationale, 2013).

Les entreprises adaptées (EA) sont des entreprises composées à 80% de travailleurs handicapés. Elles représentent une étape plus évoluée que les ESAT dans le chemin de la réinsertion professionnelle des handicapés psychiques car de vrais rendus de production sont attendus comme dans une entreprise classique.

Les centres de rééducation professionnelles (CRP) permettent aux handicapés psychiques de suivre des formations qualifiantes afin d’enrichir leurs compétences.Les Cap emploi sont des organismes de placement spécialisés (OPS). Ils ont pour objectifs d’accompagner, de suivre et de maintenir les personnes handicapées dans une insertion professionnelle. Leur fonctionnement est semblable à celui de Pôle Emploi cependant ils sont spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées (« Cap emploi », 2019).

Il existe également des hôpitaux de jour ayant un dispositif spécialisé de réinsertion professionnelle comme le Centre Mogador à Paris. Le psychologue référant accompagne l’handicapé psychique pour construire son projet professionnel et préparer son CV ou encore ses entretiens à Cap emploi. Ces différentes structures d’accueil permettent une orientation vers l’emploi. Cependant comme évoqué précédemment, il faut d’abord neutraliser les manifestations pathologiques pour y accéder, c’est à cela que servent les centres d’évaluations cognitives.



3. Centres d’évaluation cognitive


La présence de troubles cognitifs entache l’accès à l’insertion professionnelle des schizophrènes. Il faut donc en premier lieu les neutraliser. Avant toute intervention, une bonne évaluation de ces troubles est nécessaire. Pour effectuer des évaluations cognitives plusieurs outils sont utilisés : des

tests différents et spécifiques existent pour mesurer chacune des fonctions cognitives. Pour évaluer l’attention sélective le scan appréhension test ou le continuons performance test peuvent être utilisés. Ils consistent en la détection le plus vite possible d’un stimulus cible parmi d’autres stimuli. Pour mesurer l’attention soutenue l’épreuve des deux barrages de Zazzo peut être utilisée. Dans ce test le sujet doit repérer et barrer le plus rapidement possible des symboles cibles qui se trouvent parmi d’autres stimuli, mais la tâche est plus longue. Pour ce qui est des fonctions exécutives, la tâche de Stroop peut être utilisée pour mesurer l’inhibition. La tâche de Stroop se décompose en trois temps mais la tâche principale consiste à nommer la couleur de l’encre alors que le mot est lui même une couleur, par exemple si le mot "rouge" est écrit en ancre bleu, il faudra dire bleu. Pour la flexibilité mentale le Trail Making Test (TMT) peut être utilisé. La tâche principale de ce test consiste à relier en alternance un nombre et une lettre par ordre croissant et alphabétique afin de réaliser une suite. Pour la mise à jour en mémoire de travail l’épreuve des empans verbaux peut être utilisée. Elle consiste à répéter une série de chiffres ou de mots dans le même ordre puis dans l’ordre inverse de leurs présentations. Ces évaluations peuvent être effectuées par un neuropsychologue à la suite de plusieurs entretiens cliniques. Des centres spécialisés existent également comme les Centres ressources handicap psychique (CReHPsy). Ils sont présents un peu partout en France. Ils évaluent les compétences et les déficiences cognitives des personnes en handicap psychique qui s’insèrent dans un projet de réinsertion sociale ou professionnelle. Ces données sont communiquées aux équipes soignantes et aux personnels en charge de cette réinsertion. Elles sont également communiquées à la communauté scientifique afin d’améliorer le savoir sur les maladies psychiques (« Centre ressources handicap psychique », s. d.).

Ces résultats permettent ensuite d’orienter correctement les patients vers un programme de remédiation cognitive (Raffard et al., 2009) ou de psychoéducation. Les psychoéducations, réalisées par des psychoéducateurs, permettent au patient de mieux connaitre sa maladie en l’orientant vers des livres, des revues ou des associations spécialisées dans sa pathologie. Cette connaissance lui apprendra à agir de façon adaptée avec son environnement et prévenir les rechutes. Il se sentira ainsi plus impliqué dans sa guérison ce qui augmentera sa motivation et son estime de soi. Sur le long terme sa qualité de vie et son autonomie pourront ainsi être améliorées. Il faut tout de même noter que les psychoéducations ne sont praticables que sur des patients dont la pathologie est stabilisée, de plus elles ne remplacent aucun autre suivi médical ou psychologique, elles ne servent que de complément (« La Psychoéducation », s. d.).

Les remédiations cognitives elles, sont très utilisées pour réguler les troubles cognitifs. Elles

s’appuient principalement sur l’apprentissage de nouvelles stratégies afin de permettre au patient

d’affronter plus facilement les situations sociales ou les tâches qu’il lui était difficile d’accomplir auparavant. Ainsi la remédiation cognitive se base principalement sur la compensation (Franck, 2014). Elles sont réalisées par des neuropsychologues mais encore une fois, bien que plus lourde que les psychoéducations, elles ne peuvent pas être réalisées sans suivi psychologique et psychiatrique en parallèle (Bernardin, s. d.). Plusieurs études ont montré l’importance des psychoéducations et des remédiations cognitives. Wexler et Bell par exemple, trouvent une corrélation positive entre remédiations cognitives et efficacité des emplois accompagnés (Wexler, 2005).

Ainsi les organismes d’accueils apparaissent comme nécessaires dans l’insertion professionnelle des schizophrènes. Afin d’optimiser cette insertion, des organismes d’aides, comme des commissions ou des associations, ont vu le jour afin de les renforcer.



B) Organismes d’aides

1. Les commissions


En effet plusieurs commissions oeuvrent pour la réinsertion professionnelle des handicapés psychiques. La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a été créée en 2006 par le regroupement de la commission technique d’orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) chargée de l’adulte handicapé et de la commission départementale d’éducation spécialisée (CDES) chargée de l’enfant handicapé. Cette commission appartient à la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ou maison départementale et métropolitaine des personnes handicapées (MDMPH) pour le département du Rhône et la métropole lyonnaise. La CDAPH a pour but de prendre des décisions pour la personne handicapée suite aux évaluations et au plan personnalisé de compensation (PCP) élaborés par la MDPH. La CDAPH peut ainsi décider de l’orientation professionnelle la plus adaptée (EA ou entreprise ordinaire avec ou sans dispositif d’emploi accompagné), de l’attribution de la RQTH et orienter l’enfant et l’adolescent dans un cycle scolaire adapté. Le PCP est construit après un échange entre la personne handicapée et l’équipe pluridisciplinaire de la MDPH. Pour le réaliser la MDPH utilise un recueil de données appelé guide des besoins de compensation des personnes handicapées (GEVA) qui synthétise toutes les données recueillies concernant les capacités acquises ou non par la personne handicapée ainsi que ses possibilités d’action (« Le GEVA », 2019). Elle se doit d’accueillir et suivre la personne handicapée dans ses démarches. Elle a également pour but de sensibiliser la population face aux handicaps. Les évaluations des équipes spécialisées d'évaluation du handicap psychique (ESEHP) viennent s’ajouter à celles effectuées par la MDPH, elles dépendent de la CDAPH. Elles doivent évaluer le handicap de la personne, son taux d’incapacité ainsi que proposer des solutions pour son avenir (Unafam/Galaxie, 2005).



2. Les associations


Ils existent beaucoup d’associations en France qui viennent en aide aux personnes atteintes de handicaps psychiques de différentes façons. Une liste exhaustive serait difficile à rédiger mais certaines des plus importantes sont à relever.L’association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (LADAPT), créée en 1929, agit sur la réinsertion professionnelle des personnes handicapées en lui favorisant un accès à l’éducation, à la formation, et aux entreprises. Cette association se retrouve dans 110 établissements et suit plus de 19 000 personnes en 2018 (« Qui sommes-nous ? », s. d.).

L’union nationale des amis et familles de malades psychiques (UNAFAM), créée en 1963, quant à elle, propose des contrats de travail associés à un poste et non à une personne. Ainsi plusieurs personnes pourraient se partager les tâches permettant, en cas d’hospitalisation d’urgence ou d’incapacité de travail temporaire, de ne pas arrêter le travail en cours (Unafam, 2020).

La fédération nationale des associations d’usagers en psychiatrie (FNAPSY), créée en 1992, regroupe les associations françaises afin de mieux d’orienter les actuels ou anciens patients psychiatriques vers les bonnes associations, notamment pour la réinsertion professionnelle. Elle recense actuellement 59 associations et 5000 usagers. Ces associations sont en grande partie gérées par des handicapés psychiques (« Fédération Nationale des Associations d’usagers en PSYchiatrie », s. d.).

L’association Galaxie, créée en 2004, fonctionne sous forme de réseau. Elle effectue des recherches et des expérimentations dans le but d’améliorer l’évaluation et le suivi des handicapés psychiques dans leur insertion professionnelle, diminuer la discrimination ainsi qu’informer les structures concernées (« Réseau Galaxie », s. d.).

A l’échelle locale on peut retrouver par exemple l’association d’insertion par la restauration (AIR), créée en 2002 et basée à Tours. Elle a pour but l’insertion professionnelle des handicapés psychiques pour qui la pathologie est stable mais ne permet tout de même pas l’accès à l’emploi. Pour cela elle les intègre dans la cuisine d’un restaurant associatif. L’association suit les règles de la convention collective des chantiers d’insertion (« Association d’insertion par la restauration (a.i.r.) », s. d.).Beaucoup d’autre associations à l’échelle nationale et locale interviennent pour favoriser encore l’insertion professionnelles des schizophrènes.



3. Autres


D’autres organismes permettent également d’améliorer l'insertion professionnelle des handicapés psychiques.A l’échelle locale il existe le conseil local de santé mentale (CLSM). Il met en lien les élus locaux, le personnel psychiatrique, les handicapés psychiques, leurs familles et le personnel médico-social afin d’adapter le territoire local à leur insertion professionnelle et sociale ainsi que sensibiliser la population. Ce conseil n’est pas encore présent dans toutes les villes et son implantation dépend de la mairie (Assemblée nationale, 2013). On retrouve également dans les villes, différents centres ayant pour objectif l'insertion et le suivi de la personne handicapée. Comme par exemple le Centre Communal d'Action Sociale à Avignon ou l’Établissement public de santé mentale Lille-métropole à Lille.

A l’échelle nationale le comité interministériel du handicap (CIH) intervient pour la réinsertion professionnelle. En 2019 il a voté pour l’année 2020 un plan de formation au bénévolat pour les événements sportifs comme les prochains Jeux Olympiques et Paralympiques. Ce plan a pour objectif l’intégration de 3000 bénévoles atteints de handicap. Le bénévolat est une bonne entrée en matière pour la personne schizophrène car il l’insère dans un milieu riche de lien social tout en lui donnant des responsabilités légères ou qui ne repose pas que sur lui personnellement. Lors de ce même rassemblement le CIH a voté l’ouverture d’une plateforme informatique pour chaque région afin de faciliter l’accès aux offres d’aides et d’accompagnements dans l’insertion professionnelle pour les équipes de Cap emploi. Une autre plateforme d’aide destinée cette fois aux personnes handicapées a également été votée. Elle relierait les emplois, les formations et les services d’aides afin de faciliter les démarches. Et pour finir il a été voté un élargissement du nombre d’apprentis handicapés dans le domaine public et privé (Maisonneuve, 2019).

Pour lutter contre la stigmatisation des troubles psychiques de nombreuses campagnes d’information sont lancées comme la campagne "Accepter les différences ça vaut aussi pour les troubles psychiques". Elle a été lancée par le Centre collaborateur OMS (CCOMS) en 2006/2007

avec l’aide de la FNAPSY, l’UNAFAM et l’Association des Maires de France (AMF). Pour cette campagne deux cent mille affiches ont été distribuées dans la France entière ainsi que des articles de presse, une publicité télévisuel et un site interne (Lamboy & Saïas, 2013).A l’échelle mondiale l’Organisation des Nations Unies (ONU) participe à l’insertion professionnelle des handicapés psychiques et des schizophrènes en lutant contre la stigmatisation dans leur résolution A/RES/46/119 du 17 décembre 1991 "protection des personnes atteintes de maladies mentales et amélioration des soins de santé mentale" au cours de leur quarante-sixième assemblée générale. Cette résolution revendique la liberté et les droits des personnes handicapées mentales en stipulant qu’elles doivent avoir les mêmes droits que tout le monde, c’est à dire ceux évoqués dans la Déclaration universelles des droits de l’homme. Ainsi elles ont le droit de travailler et de participer à la vie commune. L’ONU promeut également une amélioration des soins pour ces personnes (Organisation des Nations Unies, s. d.).

L’OMS poursuit également cette lutte en 2001 avec son "rapport sur la santé dans le monde" en 2001 (Organisation mondiale de la santé, 2001) et en 2005 avec le "rapport de Déclaration sur la santé mentale pour l’Europe" (Organisation mondiale de la santé, 2005).Pour réaliser ces projets et ces campagnes, les différents organismes confectionnent chacun un plan souvent appelé plan de santé mentale et/ou psychiatrique. Sur ce plan on retrouve principalement les objectifs à atteindre, qui sont globalement toujours les mêmes : promouvoir la maladie mentale et éduquer la population pour diminuer la stigmatisation, offrir un accès à la société aux handicapés psychiques en adaptant l’accès au travail par exemple, leur donner des droits et leur assurer un accès aux soins convenable.




Conclusion


Il apparait ainsi que l’insertion professionnelle des schizophrènes est en progrès mais n’est pas encore optimale malgré les enjeux économiques et personnels qu’elle représente. Cette observation vient alors confirmer l’hypothèse émise.


Ce manque d’insertion émane de plusieurs facteurs : la stigmatisation et la méconnaissance des travailleurs sociaux en sont les principaux. Il apparait ainsi que l’insertion sociale est une des premières étapes à l’insertion professionnelle puisqu'elle est omniprésente dans le monde du travail. Cependant la relation sociale s’effectue à double sens et elle semble aujourd’hui compliquée du côté de la population à cause de la stigmatisation que subissent les schizophrènes. Pour palier à cela de nombreuses législations ont été éditées. Cependant la législation ne suffit pas car la mentalité n’est pas modifiée en profondeur. Des structures accueillants uniquement les handicapés psychiques et les professionnels de santé psychique ont également vu le jour. Ce fut une bonne alternative cependant elle ne reste pas suffisante et ne doit pas remplacer la prévention contre la discrimination. De nombreux organismes sont également venus renforcer l’insertion des handicapés psychiques.

La fixité de l’esprit face aux préjugés et la course aux bénéfices qui régit notre société actuelle amènent à constater qu’il est difficile de trouver une solution miracle. Le chemin pour l’acceptation de la maladie psychique fut long et celui de l’insertion professionnelle complète semble l’être également.


Ainsi beaucoup de progrès sont encore à envisager. Par exemple une meilleure considération du travail psychique effectué par le psychologue permettrait une orientation plus adaptée pour le patient. Il convient également de poursuivre et consolider le lien qui existe entre les organismes et les structures. Il faudrait également poursuivre les campagnes anti-stigmatisations et informatives auprès de la population générale, naïves et médico-sociale. Du côté des entreprises une meilleure information quand aux institutions disponibles pour les épauler dans l’embauche et la continuité du travail d’une personne schizophrène serait à envisager. Un raffermissement des lois et un contrôle plus strict seraient également bénéfiques.



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